Moissac, ville de Justes oubliée
Moissac, terre de courage et de mémoire
Dans le silence d'une petite ville du Tarn-et-Garonne, une histoire exceptionnelle s'est déroulée. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Moissac est devenu un havre de paix pour des centaines d'enfants juifs, sauvés de l'horreur grâce au courage de Shatta et Bouli Simon, deux figures emblématiques des Éclaireurs Israélites de France.
La Maison de Moissac : refuge et résistance
La Maison de Moissac a accueilli près de 500 enfants entre 1940 et 1943, puis après la Libération, jusqu’en 1951.
Avec audace et organisation, Shatta et Bouli Simon ont su convaincre les habitants de Moissac d’accepter et de protéger ces enfants. Aucun ne sera dénoncé. Aucun ne sera déporté. Tous survivront !
L'Après-Guerre : Une mémoire discrète
Après la guerre, Shatta et Bouli ont poursuivi leur mission. Ils ont dirigé une fondation affiliée à l'EEIF au château de Laversine, dans l'Oise, qui accueille encore aujourd'hui des enfants en difficulté.
Leur modestie a longtemps occulté leur rôle. Selon Shatta, sauver des enfants était un acte normal qui ne méritait pas de distinction. Cependant, leur histoire est aujourd'hui gravée dans la mémoire collective :
Leur portrait figure au Mémorial de la Shoah à Paris.
Le B'nai B'rith World Center les a reconnus comme Sauveteurs des Juifs
Ils reposent désormais au Mont des Oliviers, à Jérusalem, laissant un héritage de courage et d'humanité.
La Maison de Moissac reste un symbole fort de résistance et d'entraide, où des enfants ont vécu une enfance presque normale malgré la guerre. Ce lieu témoigne de la force de l'organisation, du leadership et de la solidarité d'un couple extraordinaire, épaulé par une communauté toute entière.
Aujourd'hui, la mémoire de la Maison de Moissac inspire les générations futures : sauver une vie, c'est sauver l'Humanité.
Le Moulin : une seconde chance pour les orphelins
Après la Libération, l'afflux d'orphelins et d'anciens résidents de la Maison de Moissac a nécessité une solution d'accueil d'envergure. La municipalité de Moissac a mis à disposition un ancien moulin transformé en hôtel. Ce lieu, en plus de loger les plus grands, est devenu un centre de formation ouvert également aux jeunes de la région.
Le Quai du Port et la résistance silencieuse
En 1940, sous le régime de Vichy, l'État français a toléré la présence des enfants juifs à Moissac grâce à leur affiliation au mouvement scout des Éclaireurs Israélites. Les autorités ont ainsi réquisitionné plusieurs maisons situées quai du Port, formant un foyer central au numéro 18.
Cependant, avec l'occupation de la zone sud par les armées nazies fin 1942, la sécurité de ces enfants n'était plus garantie. Grâce à des réseaux de résistance et à l'aide de familles locales, les enfants ont été dispersés dans des cachettes ou exfiltrés en Suisse, échappant ainsi à la déportation.
Le Parcours mémoriel
En 2022, des élèves du lycée François Mitterrand ont conçu un parcours mémoriel retraçant les principaux lieux marquants de la vie des enfants juifs à Moissac entre 1940 et 1951.
Inauguré le 13 octobre 2022 par Patricia Mirallès, secrétaire d'État chargée des Anciens combattants, ce parcours témoigne de l'engagement de nouvelles générations à préserver cette histoire, et constitue un devoir de mémoire indispensable.
L'Association Moissac, Ville des Justes Oubliée
Regroupant des enfants sauvés par Shatta et Bouli Simon ainsi que des citoyens désireux de transmettre cette mémoire, l'association Moissac, Ville de Justes Oubliée continue d'honorer les actes de courage et de solidarité qui se sont déployés entre 1939 et 1952. Par ses actions, elle perpétue l'héritage de ces Justes, rappelant que ces gestes de résistance et d'humanité transcendent les époques.
En 2013, à l'occasion d'une commémoration, l'Esplanade des Justes a été inaugurée. Remplaçant l’ancien nom Esplanade du Moulin.
En 2016, une 2ème commémoration s’est déroulée à Moissac. Un moment particulièrement émouvant de cet événement a été la cérémonie officielle de nomination de nouveaux Justes, parmi lesquels figurait la famille Bourel. Cette distinction, attribuée par Yad Vashem, honore les familles ayant risqué leur vie pour sauver des Juifs pendant la Shoah. Ces commémorations ont également permis de souligner l'importance de la transmission de la mémoire aux générations futures, rappelant que ces histoires d'humanité et de courage ne doivent jamais être oubliées.
La visite guidée sur Moissac, ville des Justes oubliée
Le Service Patrimoine de la Ville de Moissac et ses guides conférenciers, proposent régulièrement dans l’année une visite commentée axée sur la thématique « Moissac, Ville des Justes Oubliée ». Une belle occasion de se replonger dans cette histoire captivante des enfants juifs sauvés à Moissac.
